Un vrai engouement social media : l'effet nouveauté fonctionne


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  • 200 000 posts et retweets impliquant plus de 68 000 comptes sur X, avec une proportion de retweets plutôt faible pour un événement sport/gaming (58%) : les internautes ont effectivement commenté l’événement en direct et été engagés par les contenus vidéos des temps forts.

    À titre de comparaison, 200 000 posts sur X, c’est, à peu près, le niveau de conversations générés par la première édition du GP Explorer

  • Sur Instagram et TikTok, c’est l’engagement en commentaires et le volume de vues générées sur les vidéos qui impressionne. Sur ces réseaux, c’est davantage l’immersion communautaire au sein des équipes qui a permis d’engager le public de chaque président de club
  • Les streamers français ont une force de frappe importante et savent créer des pics de visibilité : dans le top 10 des pics de viewers sur la compétition, on retrouve 6 français (selon Sullygnome)
  • La diffusion sur Twitch et M6+ a permis d’avoir une large visibilité. DAZN, le diffuseur de la Ligue 1 plafonne à 500 000 abonnés en France, les présidents de la Kings League cumulent plusieurs millions de followers. 80 % de l'audience de l'événement a moins de trente ans, selon son Directeur Général Djamel Agaou
  • En Espagne, le lancement avait été davantage suivi : 15 millions de spectateurs pour la Kings League sur Twitch lors de la 1ère journée de championnat. C'est 5 fois plus que la 15e journée de Liga au même moment. Au Brésil, le projet cartonne sur le volet streaming.

Le vrai défi : conserver l'attention du public sur le long terme

2 véritables pics d’attention et de conversations ont été générés :

  • Lors de la "draft" le 24 mars : une soirée spéciale avait été retransmise en direct, avec la présentation des présidents et du staff de chaque équipe, ainsi que du choix des joueurs après leur journée de sélection à Clairefontaine.
  • Pour la première journée de la Kings League France, le 6 avril : un franc succès avec plus de 2,6 millions de viewers en cumulé sur 9h30 de streaming (L’Équipe).
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Une baisse d’attention statistique : la baisse du volume d’impressions générée par les contenus de la Kings League (ci-dessus) contraste avec le volume de publications qui reste régulier.

Maintenir le public concerné et impliqué dans le déroulé, alors que la compétition avance : voilà la véritable difficulté.
 Le suspense diminue, certains créateurs de contenu sont éliminés prématurément, les mécaniques du jeu commencent à être plus routinières et une lassitude peut s’installer chez certains internautes.

La Kings World Cup Clubs a moins séduit les internautes français

Après les 7 journées et les play-offs, l’absence d’une équipe française dans le dernier carré de la Kings World Cup Clubs n’a pas aidé à rendre visible la finale, qui était pourtant à La Défense Arena, dans un stade plutôt rempli.

Le pic de visibilité francophone sur les réseaux sociaux du 14 juin correspond au match des youtubeurs Français contre le "Reste du Monde", et non à la véritable finale des équipes espagnoles Porcinos FC contre Los Troncos FC.

À noter, des événements majeurs comme la victoire du PSG en Ligue des Champions sont également concomitants avec une baisse de l’attractivité des contenus de la Kings League. Le divertissement peut être très vite remplacé par le football traditionnel.

Réception positive de l'événement : le divertissement au rendez-vous

D’un point de vue quantitatif, l’analyse des sentiments des 200 000 posts sur X indique dans l’ensemble une bonne réception de l’événement : l’emploi d’un lexique positif, et une utilisation d’émojis optimistes par les internautes : 

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D’un point de vue qualitatif, nous avons pu analyser les principales thématiques abordées par ces publications. Elles sont majoritairement positives, et liées à un engouement du suivi de l’événement : 

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Sur l’ensemble de ces thématiques, seules les 3 dernières peuvent être assimilées à des conversations plus critiques ou nuancées, alors que la plupart des publications et relais sur le sujet indiquent davantage une adhésion du public au divertissement.

Engouement communautaire : la force du narratif

La création de cette ligue a été l’occasion d’observer la création de communautés express sur les réseaux sociaux.

Chaque équipe a investi plusieurs canaux, monté une équipe social media, testé des formats de communication autour de son projet afin de faire vivre l’intérieur de la compétition et embarquer son audience dans ce projet (vlogs Youtube, trends TikToks etc).

Intuitivement, on pourrait penser que les équipes qui ont eu les meilleurs résultats sportifs ont été celles qui ont le mieux consolidé leurs communautés, mais ce n’est pas le cas.


Sur X, deux communautés se détachent : F2R & Domingo

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Difficile de valoriser le streaming sans présence sur un réseau qui valorise la réaction en direct comme X.  

  • L’équipe F2R de Amine a bénéficié de l’activité du compte @foot2rueultras qui occupe une position de hub de diffusion au sein de la communauté. Ce n’est pas surprenant au vu de l’implantation historique de Amine sur ce réseau et l’invitation de l’équipe pour la dernière Kings World Cup.

  • Domingo a réussi à fortement engager sa communauté dans son projet grâce au narratif du FC Silmi, club dont l’identité existait déjà avant la compétition. Malgré les défaites de son équipe, le FC Silmi a été l’équipe qui a vendu le plus de maillots.

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Sur Instagram, c’est Unit3d qui remporte le match, avec le plus de likes, le plus de followers et un taux d’engagement excellent à plus de 27%, grâce à la communauté des 3 présidents : Squeezie, Maxime Biaggi, Djilsi, et un large staff.

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Sur Tiktok, c’est 360 Nation qui se distingue en cumulant plus de 3 millions de vues. L’équipe a parfaitement surfé sur l’algorithme qui valorise les vidéos de plus de 1 minute, et su provoquer les équipes adverses.  

L’incarnation reste toutefois déterminante sur ce réseau prisé de la gen Z, où le compte de Michou génère plus de 5 millions de vues à lui tout seul, soit 10 fois plus que celui de son équipe Generation Seven (et avec son compte secondaire !).  

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Vers l'émergence de l'influballer ? 

Il semblerait que la compétition nous éclaire sur l’émergence d’une nouvelle catégorie d’influenceurs : les footballeurs créateurs de contenu.

Plusieurs joueurs se définissent désormais comme des joueurs Kings League et acquièrent une notoriété croissante sur les réseaux sociaux, à condition qu’ils capitalisent sur l’exposition qui leur est donnée.

Ceux qui performent sur les réseaux créaient déjà du contenu avant la compétition



Certains footballeurs et créateurs de contenu comme Val Liénard ou encore JMK ont su tirer profit de la séquence afin de consolider leurs audiences grâce au parcours Kings League, et devenir des acteurs incontournables du projet.

D’anciens footballeurs professionnels comme Benoît Costil, ou Anthony Scaramozzino trouvent dans l’événement un moyen de renouer avec les projecteurs, s’amuser, et développer leurs audiences.  

La Kings League a pu compter sur la participation de Tony Czech, l’un des footballeurs influenceurs les plus suivis de Tiktok, qui cumule 16 millions d’abonnés sur Tiktok, et plus de 6 millions sur Instagram.


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L'arbitrage en question

L’arbitrage s’est imposé comme un sujet de débat à part entière, une véritable polémique à gérer pour les organisateurs de la compétition.

On recense plus de 7800 tweets et retweets sur le sujet (dont 3 124 tweets natifs), qui ont impliqué 5 174 comptes. Cela représente 4% des conversations sur X. Le sujet est nettement moins visible sur Instagram et TikTok.

En effet, l’arbitre et Youtubeur RG28 a médiatisé son départ de la Kings League, un mois après le lancement de la compétition. Il évoque plusieurs raisons :

  • Une pression physique ressentie sur le terrain ;
  • Des menaces reçues dans l’espace VAR par un membre du staff d’une équipe ;
  • Un manque de formation des arbitres face aux règles et à l'utilisation de la VAR ;
  • Des injonctions contradictoires entre l’organisation française et espagnole, et l’absence de sanctions afin de défendre les arbitres.


 

 

 

Au bout de quelques journées, l’arbitrage est devenu un sujet de discorde qui incite les viewers à réagir. La visibilité de certains messages démontre l’adhésion du public à cette “dérive” sur l’arbitrage. Le débat va également se déporter sur le sujet de la rémunération des arbitres (50€ par match, 200€ par journée), après avoir été révélée par RG28.

Des signaux faibles conversationnels : racisme en tribune et narratifs sur la corruption à surveiller

Racisme : 1 168 tweets 

Dès la première journée, première alerte : plusieurs ultras parisiens ont entonné un chant raciste à l’égard de l’équipe de Adil Rami dont l’Olympique de Marseille est partenaire.

Le gardien de l’équipe Unit3d a également été victime d’injures racistes en plein match,

AmineMaTue a condamné ces actes, mais certains internautes évoquent des insultes répétées en tribune.  

 

Corruption : 1 230 tweets 

Amine occupe à la fois la position d’organisateur et de participant, ce qui génère de l’ironie et de l’humour sur une prétendue corruption de la ligue.

Sous l’ironie, une portion bien réelle de messages et de commentaires évoque ou insinuent qu’il y a de la corruption, selon les faits de jeu, à l’avantage de Amine ou Squeezie. 

 

L’organisation doit pouvoir monitorer ces sujets afin d’éviter des crispations potentielles sur les prochaines éditions.

Sponsors : réactivité et créativité payent

« 60 à 65 % des revenus proviennent des sponsors » rappelait Djamel Agaou, ces derniers « obtiennent un canal à fort engagement permettant d'atteindre la nouvelle génération, qui délaisse de plus en plus la télévision ». Deux espaces publicitaires ont été prévus sur les tenues pour leur commercialisation, avec un pourcentage sur les recettes de merchandising.

Maillots, équipementiers et insertion dans le direct ?

Parmi les principaux sponsors du projet Kings League, Adidas était omniprésent visuellement, du ballon aux maillots en passant par les panneaux publicitaires fluorescents. Sur X, le compte @adidasfr a opté pour une diffusion massive d’extraits de l’événement : des actions spectaculaires, célébrations, et parfois joué le jeu du trash talking : 160 tweets et plus de 65 millions d’impressions.  

Le Crédit Agricole est le premier grand sponsor français à s’être engagé. La marque a poursuivi son investissement dans le football français et le déploiement de sa verticale @tousuncotefoot sur X qui a publié de nombreuses créas pour informer sur les scores, le classement de la ligue : 42 posts et plus de 400 millions d’impressions.

Ces deux sponsors ont joué le jeu et ont pleinement investi les espaces sociaux pour faire partie de l’univers Kings League France.

 

Sponsors équipe : les opérations et jeux concours restent la norme...

Chaque équipe possède également ses propres sponsors. Parmi les méthodes les plus récurrentes pour obtenir de la visibilité, ces derniers ont déployé un arsenal d’opérations et jeux concours. Ce n’est pas la meilleure manière d’obtenir un following qualitatif, mais cela reste un fonctionnement classique.  

Le “give away” de Domingo avec son sponsor Holy a été le post le plus relayé de toute la compétition sur X, avec un vrai prix à la clé. Mais cela n’a pas empêché l’entreprise d’essuyer sur la même période une crise réputationnelle.  

Certains annonceurs ont peu investi les réseaux sociaux, et se sont contentés de quelques cross posts avec leurs équipes.

... mais la créativité et l'insertion dans le narratif payent

Afin de s’insérer dans le récit de son équipe, ou de marquer le public, on retient 2 initiatives :

  •  La vente exclusive d’équipementiers Unit3d sur Vinted qui a été largement expliquée en direct par les présidents de clubs, une initiative qui a rassemblé plus de 43k personnes sur le profil de l’équipe sur le site Vinted. 

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  • Le trophée Subway de la “Pépite du match” en référence aux cookies vendus par la chaîne de fast food. Une habile manière de créer un pont entre les 2 univers, et l’assurance d’avoir une séquence à la fin de chaque match.   

Conclusion de Thomas Martinez

Alors que la première saison s’achève, le public n’a pas été informé au sujet de la continuité de l’événement : y aura-t-il un nouveau “split” en octobre, une deuxième saison ? Devrons-nous patienter jusqu’au printemps 2026 ?  

La Kings League investit en moyenne cinq à six millions d'euros pour lancer ses nouvelles ligue (Les Echos). Saura-t-elle trouver une formule rentable en France ?

Créer de la rareté ou enchaîner ? Voilà le défi auquel est confrontée l’organisation de la Kings League après cette 1ère saison.

Sportivement, 2 saisons par an, cela permet aux joueurs qui se tournent vers la Kings League d’avoir un rythme de compétitions plus complet, de développer la mécanique de “mercato”, et de consolider l’économie du projet et le sponsoring.

Une meilleure inclusion de certaines régions dans la détection est à trouver. Enfin, une dynamique de partenariat avec la LFP permettrait d’éviter les conflits au sujet de la participation de certains joueurs sur plusieurs tableaux.

D’un point de vue événementiel, temporiser pourrait être judicieux. En effet, les mécanismes de construction d’une ligue diffèrent fortement de la logique événementielle en “one shot” des événements classiques qui croisent sport & streaming.

Le calendrier et les règles de la compétition pourraient être retravaillés afin de conserver l’attention, maintenir du suspense, impliquer les présidents éliminés, et mieux communiquer sur les play-offs.

Quant à la finale, n’est-ce pas un contresens événementiel si aucune équipe locale n’y est qualifiée d’office ? N’est-il pas risqué de communiquer sur la présence de joueurs VIP comme Neymar, Lamine Yamal, ou Ibrahimovic s’ils ne sont pas présents à l’arrivée ?