NOUVEAU - CEO américains & réseaux sociaux : état des lieux

Badbuzz
Le T-shirt à « étoile jaune » de Zara : sur les traces du badbuzz

Bénédicte Matran
Directrice Communication

@BMatran

La grande enseigne de prêt-à-porter espagnole n’en est pas à sa première bévue. En 2007, la marque commercialisait un sac à main à motifs indiens sur lequel s’était immiscée une croix Gammée, symbole du nazisme. Zara s’était platement excusée de cette « maladresse » et le scandale s’était tassé.

Sept ans plus tard, Zara récidive en commercialisant un T-shirt pour enfant rayé et orné d’une étoile jaune.

Une inspiration de très mauvais goût puisqu’elle n’est pas sans rappeler les tenues des prisonniers juifs dans les camps de concentration.

Les consommateurs offusqués ont fustigé le produit et exhorté l’enseigne à le retirer des ventes. L’affaire a fait grand bruit sur les réseaux sociaux, obligeant Zara à adopter une position de crise.

Nous vous proposons de revenir pas-à-pas sur l’éclosion de ce « badbuzz » sur la Toile pour en comprendre le déroulement et en analyser les différentes étapes. Pour ce faire nous utilisons notre plateforme Visibrain afin de récupérer l’intégralité des tweets évoquant « Zara ».

L’émergence de la crise

Les premiers tweets

Le lundi 25 août, Zara fait la communication de sa nouvelle collection automne/hiver : pour les hommes, pour les femmes et pour les enfants. Dans la journée, 3 tweets sont publiés pour présenter le « LookBook Back to school » :

Tweets de lancement du nouveau lookbook zara

Jusque-là rien d’alarmant.

Pourtant le lendemain, le mardi 26 août à 22h45 @ttensSION, un internaute baptisé « CHAYOU » entouré de deux étoiles de David, relève un article. Il publie simplement le lien (depuis supprimé), sans aucun commentaire.

A 22h47, une autre internaute @Kalamityjune1 est choqué par cet article, un pyjama pour enfant rayé et agrémenté d’une étoile jaune. Elle publie un tweet avec une capture d’écran pour interpeller Zara.

La communauté juive s’empare immédiatement de cette affaire. La première conversation sur la polémique éclate.

Choqués, les internautes encouragent à « faire tourner » :

Petit à petit l’affaire sort de la sphère juive, une dizaine de tweets sont publiés soit en réponse à @Kalamityjune1 soit indépendamment pour dénoncer le vêtement.

A 23h24, une deuxième conversation beaucoup plus virale (570 RT) démarre avec le tweet de @garyassouline :

Et une troisième suite au tweet de @ludoFJ à 23h27 :

Dans les réponses, les internautes s’insurgent et en appellent directement à la marque attendant une « réponse de leur part » et espérant que l’affaire « prenne ». A partir de ce moment, les tweets concernant Zara ne parlent plus que de ce T-shirt ambigu comme en témoigne le nuage des expressions les plus utilisées :

Les expressions qui gravitent autour du sujet sur Twitter

La crise éclate

Après une nuit agitée, la polémique s’envenime le lendemain matin le 27 août dès 7h. La courbe du volume horaire de tweets s’envole pour atteindre plus de 128 000 à son apogée.

La timeline des tweets après explosion de la crise

La stratégie de réponse de Zara

Prise dans l’engrenage, l’enseigne espagnole a dû mettre en œuvre une stratégie de crise. La marque a pris la décision de répondre individuellement à ses internautes, en plusieurs langues.

A 10h39, le compte officiel @ZARA répond en anglais à @n_rothschild :

Visiblement lancée l’équipe de Community Managers de l’enseigne, applique la réponse qui semble avoir été décidée en interne et répond à 11h22 en français :

Toute la journée, des plages horaires « réponses aux internautes » semblent se dessiner. Entre 11h23 et 12h06, Zara publie ses excuses à 8 personnes et amorce une nouvelle langue : l’allemand.

Après le déjeuner, de 13h38 à 14h26, nouvel épisode d’excuses. La marque publie 9 nouveaux tweets en français et en anglais.

De 15h53 à 16h34, Zara publie 15 fois son tweet d’excuses dont une première fois en Espagnol.

Après une courte pause, 24 tweets sont publiés entre 17h36 et 19h29. La journée se fait longue et Zara fait une deuxième maladresse en renouvelant ses excuses à @n_rothschild, à qui la marque a déjà présenté ses excuses plus tôt dans la journée.

Enfin, 20h41 – 21h, 7 derniers tweets d’excuses sont publiés puis c’est terminé pour le 27 août.

Le lendemain, jeudi 28 août, l’entreprise reprend son rituel à 9h55 mais ne publie que 5 tweets dans la journée.

Le sur-lendemain et les jours qui suivent, plus aucun tweet d’excuses n’est envoyé.

Une soixantaine de tweets ont finalement été publiés en réponse aux twittos. Quant à savoir comment Zara a choisi les personnes à qui elle répondait c’est une question épineuse. En effet, non seulement l’enseigne a répondu deux fois à la même personne et ne pouvant répondre à tous compte tenu du nombre de réactions il semblerait qu’elle se soit concentrée au petit bonheur la chance sur des personnes ayant tweeté le jour même et directement mentionné @Zara, sans toutefois être exhaustive.

La presse s’en mêle

La presse s’est emparée de l’affaire après que celle-ci eut éclaté. Avant la première réponse de Zara à 10h39 le 27 août, Brainmagazine et Europe 1 sont les premiers à évoquer la polémique du t-shirt à l’étoile jaune.

Le reste des articles a déferlé après les excuses publiques de l’entreprise et émergent depuis plusieurs pays. Parmi les plus retweetés figurent el Pais en Espagne, Le Monde et Le Parisien en France et Guardian news au Royaume-Uni.

Top des sites des presse qui ont publié sur l'affaire

En commercialisant ce T-shirt ressemblant très étroitement aux vêtements imposés par les Nazis lors de la Seconde Guerre Mondiale, l’enseigne espagnole Zara s’est attiré les foudres des consommateurs qui ont manifesté leur mécontentement sur les réseaux sociaux. Sur Twitter plus spécifiquement, l’éclosion s’est fait en deux grandes phases : des internautes, en l’occurrence la communauté juive, dénonce le produit puis exhortent à la condamnation. La polémique grandit et Zara se doit de répondre. La marque adopte une stratégie sociale assez confuse en répondant à certains internautes dans plusieurs langues. Le pyjama est certes retiré des ventes, mais l’ampleur de cette nouvelle crise risque d’écorner l’image de marque de Zara, déjà questionnée sur son antisémitisme latent.