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L'avis des experts
Comment les figures politiques utilisent les réseaux sociaux ? Réponse avec Véronique Reille Soult

Marie Guyomarc’h
PR & content manager

@MarieGuyomarch3

Internautes, marques, influenceurs, associations… Aujourd’hui, tous (ou presque) sont présents sur les réseaux sociaux et animent ces plateformes au quotidien. Mais, ils ne sont pas les seuls. Les personnalités politiques saisissent également l’opportunité de ces médias sociaux pour s’exprimer et débattre. Mais sur quelles plateformes sont-ils ? Quels sont leurs messages ? Et quel ton utilisent-ils ?

Pour répondre à toutes ces questions, nous laissons la parole à Véronique Reille Soult, Présidente de Backbone Consulting et experte des réseaux sociaux.

Quelle est la place des réseaux sociaux dans la communication des politiques ?

Les politiques ont bien compris l’importance de s’exprimer sur les réseaux sociaux, mais à ce jour peu d’entre eux ont pris la pleine mesure des possibilités de ce canal de communication.

Pour la plupart, les messages restent dans une logique de « prise de micro », une logique top-down de partage de leur position et point de vue sur des sujets d’actualité. C’est davantage un moyen pour émerger et parler directement aux citoyens, une façon de contourner les médias traditionnels, même si ceux-ci restent l’alfa et l’oméga de la communication politique. On n’est pas loin d’une logique de « communiqué de presse » adapté aux plateformes numériques. Les réseaux sociaux sont donc devenus des canaux de communication à part entière des femmes et hommes politiques.

La création massive de comptes notamment sur Facebook et X (ex Twitter) puis plus récemment sur LinkedIn, en est la démonstration. Ces trois réseaux demeurent les principales plateformes utilisées par l’ensemble des classes politiques. Instagram, TikTok et YouTube sont plus faiblement utilisés car les contenus sont les plus complexes et nécessitent la définition et le suivi de véritables stratégies de communication digitale, encore peu développées dans cet univers. En effet peu de personnalités politiques, bien qu’ayant investi massivement les réseaux sociaux, possèdent des lignes éditoriales distinctes par réseau, la majorité dupliquant les contenus d’un réseau à l’autre passant à côté des publics qu’ils souhaitaient toucher.

Comment les réseaux sociaux ont-ils changé le rapport des internautes au monde de la politique ?

Les internautes eux ont pris la pleine mesure des possibilités offertes par les réseaux sociaux. La possibilité de donner son avis, de commenter et de proposer mais surtout la possibilité d’interpeler directement les personnalités politiques.

Désormais il est possible de parler directement au président de la République, à ses ministres, aux députés et sénateurs, aux maires et à l’ensemble des acteurs publics, chacun l’a intégré et beaucoup le font. Mais le nouveau problème est désormais le manque de réponse et de dialogue. Parler sans être entendu provoque souvent plus de frustrations et de colère que de satisfaction. C’est donc là l’enjeu pour les politiques, dépasser la communication descendante et « rentrer en conversation » !

Les réseaux sociaux sont-ils devenus des indispensables dans la communication des politiques ? Et remplacent-ils les médias traditionnels (télévision, radio, spot publicitaire…) ?

Avec un nombre croissant d’utilisateurs actifs les réseaux sociaux sont effectivement devenus incontournables (les derniers chiffres montrent une augmentation significative avec désormais plus de cinq milliards de personnes dans le monde !). C’est d’autant plus vrai qu’il ne faut pas oublier que sur les réseaux sociaux il y a certes un grand nombre de personnes qui s’expriment mais il y a surtout une immense majorité de personnes qui s’informent sans pour autant participer et interagir. Il s’agit des fameux lurkers, si difficiles à identifier, à mesurer et à comprendre.

3 autres raisons rendent les réseaux sociaux indispensables dans la communication politique :

  • L’usage décroissant des médias traditionnels. Une partie des électeurs (les plus jeunes notamment) ne sont atteignable que sur les canaux digitaux.

  • La possibilité pour une personnalité politique de se bâtir des communautés de soutien à travers les réseaux sociaux et ainsi d’amplifier la visibilité des messages véhiculés.

  • L’instantanéité des réseaux sociaux qui permet aux personnalités politiques de créer de la proximité et du lien ce qui n’est pas réalisable avec les canaux traditionnels.

Pour autant il ne faut pas se tromper, les médias traditionnels sont encore le socle de toute réputation et de toute action de communication politique. Les réseaux sociaux ne les ont pas remplacés, ils sont davantage dans une logique de complémentarité.

Outre les canaux traditionnels tels que X/Twitter et Facebook, les figures politiques sont-elles actives sur LinkedIn, TikTok, Instagram et YouTube ?

Les figures politiques en deux ans ont massivement intégré le réseau social professionnel LinkedIn étant donné la dimension qu’a pris le réseau, les publics touchés et le fait que le réseau reste encore aujourd’hui préservé des vagues de messages haineux qu’il peut il y avoir sur X/Twitter notamment.

Avec l’essor de TikTok auprès des jeunes, ce dernier a également été très investi par les personnalités politiques et notamment les cadres des différents partis politiques, avec pour objectif d’intéresser les plus jeunes à la politique avec des vidéos face caméra simples et pédagogiques. Jordan Bardella, le président du RN, en est l’exemple le plus probant avec un compte cumulant 1,1 million de followers sur ce réseau. Mais de manière générale, les codes de TikTok restent cependant encore mal compris par la plupart des personnalités politiques.

Pour Instagram l’approche est différente et ce réseau reste peu utilisé par les politiques même s’ils possèdent fréquemment un compte, peu de contenus sont publiés. Pour autant certaines personnalités, comme le Premier Ministre Gabriel Attal, l’utilisent en réactions positives, comme lors de la parodie de sa Déclaration de Politique Générale par Florence Foresti.

Enfin on constate que YouTube est plutôt utilisé comme une plateforme de stockage de vidéos ou de rediffusion d’extraits télévisuels que comme un réel canal de communication avec une stratégie dédiée. A l’exception de quelques personnalités qui ont investi ce réseau et en ont fait un tremplin vers un cercle fermé. C’est le cas de Florian Philippot qui cumule 482 000 followers sur cette plateforme et pour qui sa chaine est son principal lieu d’expression.

Quels sont les messages véhiculés sur les plateformes (débat, échange, partage, affront, contradiction…) ? Et sous quelle forme ?

Les messages véhiculés par les politiques correspondent à leur « positionnement » et, au-delà des variantes de format et de ton, les plateformes sont utilisées de façon assez linéaire.

Le vrai changement apporté par les plateformes est l’expression des citoyens. Comme nous l’avons évoqué les citoyens sont en mesure de s’exprimer, de donner leur avis et même d’interpeller directement les politiques. Le sujet devient plus le nombre de personnes qui s’expriment, le nombre de messages générés et donc la visibilité de chacun.

La question devient donc « comment émerger ? », « comment être vu pour être entendu ? ». Cette nouvelle préoccupation de la visibilité engendre des comportements excessifs. Pour émerger il faut être dans l’excès de … beau, intelligent, drôle, émouvants … ou … violents ! Nul besoin de développer les conséquences de ce constat.

Quels seraient vos conseils pour maîtriser sa communication politique ?

Mes conseils sont simples et emprunts de bons sens : écouter pour comprendre et pour dialoguer, tout en restant cohérent avec vos convictions. Enfin, c’est l’alignement entre vos propos et vos actes qui est la clé du succès : avoir une « colonne vertébrale » solide est le meilleur garant de résultats de la communication qu’elle soit politique, corporate ou commerciale.

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